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Un psychologue, pour quoi faire ?

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Ce mois-ci, Giacomo Di Falco, psycho-oncologue au CHU de Lille, nous propose de revenir sur la question de l’intérêt, pour les patients atteints de cancer, de voir un psychologue, et ce à différentes étapes de leur parcours de soins.


Témoignage

« Quand le médecin m’a annoncé la maladie, il m’a aussi précisé que je pouvais faire appel à un psychologue qui travaillait dans le service. Au départ je ne l’ai pas très bien pris : je lui ai répondu sèchement que je n’en avais jamais eu besoin dans ma vie, et que ce n’était pas aujourd’hui que ça allait commencer. Après tout, je ne suis pas fou ! J’ai un cancer… J’étais assez en colère… Je ne voyais pas du tout ce qu’un psychologue allait pouvoir changer à la situation.

Et puis au fil des jours, et même des semaines, je me suis rendu compte que je n’étais pas dans mon état « normal », je ne me reconnaissais plus : j’oubliais des choses, beaucoup de « petites choses » du quotidien, je dormais mal, et surtout je pensais beaucoup trop. Avec du recul, je crois d’ailleurs que c’est pour ça que je dormais mal ! Impossible d’arrêter la turbine à penser ! Et bien sûr, je ne pensais pas à des choses très positives… Et ça n’allait pas en s’améliorant. Je pleurais de plus en plus souvent, et comme je me sentais sous tension, je me disputais beaucoup avec mon entourage, et mes proches.

Alors j’ai fini par accepter de le rencontrer, le psy, « juste pour faire sa connaissance », comme j’ai dit au médecin. Et j’ai été très surpris ! J’ai compris que lorsqu’on rencontre une épreuve dans la vie, c’est parfois tout un art de se laisser aider… Déjà, le simple fait de parler de la situation a très fortement diminué la pression, ça m’a donné l’impression de faire de l’ordre dans ma tête. Et puis le psy m’a aussi donné quelques astuces pour prendre soin de ce que je pense… je n’y avais jamais pensé auparavant ! »

Michel, 58 ans


Pour quelles raisons peut-on avoir besoin d’un “psy” dans votre situation ?

– Les psychologues ne sont arrivés dans les services de médecine que très récemment, avec les progrès que nous avons fait notamment au croisement de la psychologie cognitive et des neurosciences : il apparaît de plus en plus évident que l’esprit et le corps sont en étroite collaboration l’un avec l’autre, et plus encore en situation de soin. On pourrait comparer le psycho oncologue davantage à un « coach » qu’à un psychanalyste : il ne vous demandera pas de vous allonger sur un divan pour lui parler de votre enfance, mais il vous accompagnera dans les moments difficiles, sans vous juger, en vous aidant à aller chercher des ressources en vous que vous n’auriez parfois même pas osé imaginer.  Les sportifs de haut niveau font eux aussi appel à des « coach » et des psychologues, pour améliorer leurs performances. Car vous soigner est devenu une activité à part entière, et on ne saurait aujourd’hui considérer le corps en laissant de côté l’implication du mental et de la motivation dans la performance que peut représenter votre parcours de soin.

– Vous pourrez absolument tout lui dire de votre état d’esprit, car il est formé pour ça, ainsi qu’à trouver des solutions aux problèmes qui peuvent se poser.

– Parler de ses problèmes à une personne tierce, un « inconnu » en somme, est utile quand il vous semble justement difficile d’aborder certains sujets avec des personnes avec lesquelles vous êtes trop engagé affectivement.

– L’annonce d’une maladie chronique comme le cancer est un événement qui peut être comparable à un accident de la route. Et en ce sens, il peut aussi générer un traumatisme. Et, s’il est vrai que le psychologue ne sera pas en mesure de changer la situation, il fera de son mieux pour vous aider à avoir un nouveau regard sur ce que vous en pensez. Cette notion sera fondamentale dans votre parcours, comme dans la vie en général. Le philosophe Épictète y faisait déjà référence il y a près de 2000 ans en disant ceci :

« Ce ne sont pas les événements eux-mêmes qui nous perturbent, mais ce qu’on en pense. »

Et c’est précisément ce qu’un psychologue pourra vous aider à faire : il ne pourra pas changer la situation, mais pourra vous aider à l’accepter, en modifiant avec vous le regard que vous portez sur elle. En évitant ainsi de rester coincé dans la douleur morale, vous pourrez continuer d’avancer dans votre vie et continuer de faire des projets, même avec une maladie chronique.

– Il pourra aussi vous aider à communiquer avec votre entourage lorsque vous ne savez pas comment échanger avec eux au sujet de votre maladie.

Il pourra aussi aider à faciliter la communication entre vous et votre médecin ; veiller à ce qu’il entende bien toutes vos demandes, et à ce que vous puissiez lui poser toutes les questions que vous souhaitez lui poser, sans avoir peur d’être jugé.

– Il pourra vous permettre de changer vos représentations de la maladie, afin d’éviter de rajouter de la peine à la douleur. La réalité des événements suffit.

– Enfin, le psy pourra aussi parfois jouer un rôle de « miroir », en étant l’interprète de vos besoins et de vos ambivalences.  Nous pouvons tous, à un moment donné, être contaminés par notre propre subjectivité et seul un regard extérieur bienveillant et qui ne juge pas peut aider à avancer.

Pour plus d’information, n’hésitez pas à contacter votre médecin.

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SOURCES