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Comment parler de ma maladie à mes enfants ?

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Ce mois-ci, Giacomo Di Falco, psycho-oncologue au CHU de Lille, nous propose de revenir sur la question des enfants face à un parent malade. Leur annoncer la maladie est une épreuve en soi qui peut renforcer un sentiment de culpabilité délétère…

« Dire la vérité est la façon de se tromper la mieux acceptée. »

JEAN-MICHEL RIBES

Témoignage

« Avec mon mari nous ne savions pas comment aborder ce sujet avec les enfants. Les premiers jours après l’annonce, on reportait tout le temps au lendemain car j’avais peur de me mettre à pleurer devant eux. Le médecin nous a alors mis en contact avec une psychologue, qui nous a donné quelques pistes et nous a permis d’apaiser la culpabilité que je pouvais ressentir, et aussi les angoisses qui commençaient à tourner en boucle dans ma tête. Après la deuxième consultation je me suis sentie prête pour leur annoncer cette nouvelle. Sur les conseils de la psychologue, nous avons préféré leur annoncer le matin plutôt que le soir, pour ne pas les laisser avec cette information avant qu’ils aillent au lit. Ils n’ont pas réagi comme je le pensais, ils ont bien entendu la vérité, et l’après-midi nous sommes allés dans une fête foraine avec eux. Nous avons passé un super moment, et je me sentais vraiment bien, car tellement libérée d’un poids qui m’accompagnait tous les jours précédant cette journée. » Anita, 42 ans.

Aspects Psychologiques

Avant toute chose, il est important de préciser qu’il n’existe pas réellement de bonne et de mauvaise façon de faire. Il n’existe pas de “recette” toute faite. Bien sûr, nous voulons tous mettre nos enfants à l’abri des épreuves. En tant que parent nous souhaitons même les protéger de tout. Mais souvenons-nous que nous-mêmes, alors que nous étions encore à l’âge tendre, nous avons traversé des moments difficiles. Et ce sont ces épreuves-là qui nous mettent au contact de ce qui constitue la vie de chacun : un ensemble de bons et de mauvais événements. Mais même si nous gardons une saveur amère de ces épreuves, nous savons qu’elles nous ont aussi construites, et qu’elles nous ont ainsi « faits » tels que nous sommes aujourd’hui.

Il n’est pas rare que les parents se sentent coupables d’avoir à annoncer que papa ou maman est malade. Il s’agit là en fait d’une culpabilité mal placée, car si nous regardons le problème en face, jamais nous n’aurions choisi délibérément de tomber malade, et encore moins de tourmenter nos enfants. Mais que l’on soit enfant ou adulte, on a toujours bien plus peur de ce qui nous est caché, comme de ce que l’on ne voit pas. Car notre imagination amplifie les faits, et bien souvent les rend plus anxiogènes qu’ils ne le sont en réalité.

Les clés pour rebondir

  1. Il est important de planifier ce que l’on doit dire à ses enfants. Si les deux parents sont disponibles le faire à deux. Si nécessaire, en parler à ses enfants, chacun, séparément. Attendre d’avoir quelques éléments de réponses positifs à pouvoir leur fournir : la date du début du traitement, par exemple.
  2. Ne pas avoir peur d’exprimer vos émotions devant vos enfants, tout en essayant de ne pas dramatiser la situation. Malgré leur jeune âge, ils sont suffisamment intelligents pour percevoir qu’il y a un décalage entre ce que vous leur dites et votre état émotionnel. Ne pas cacher vos larmes c’est faire confiance en leur intelligence. Les informations à partager ainsi que l’expression de vos émotions dépendent de l’âge de l’enfant. Les enfants de moins de 8 ans ou entre 8 et 12 ans et plus, n’ont pas besoin du même niveau d’informations, et ne sont pas capables de comprendre de la même façon vos émotions ou tout ce qui leur est dit.
  3. Leur parler au présent : papa ou maman a un cancer, papa ou maman décide de se soigner, le docteur lui donne des médicaments pour combattre la maladie, … Tout ce qui porte sur le futur est incertain, que l’on soit malade ou non. Les enfants sont bien plus connectés avec le présent que nous le sommes en tant qu’adultes.
  4. Donner le temps nécessaire à ses enfants pour poser leurs questions et exprimer ce qu’ils ressentent.
  5. Souvenez-vous toujours bien du fait qu’un secret, même dans l’intention de protéger de la vérité, est un mur que vous dressez entre vous et votre enfant – garder un secret pourrait faire en sorte que l’enfant se sente isolé. Nos enfants ne nous reprocheront jamais de leur avoir dit la vérité.

Quelques pistes pour aller mieux

Pour parvenir à éradiquer un éventuel sentiment de culpabilité, il est important de se rappeler en premier lieu qu’il s’agit là d’une culpabilité « déplacée ». Elle n’est pas justifiée puisque nous ne souhaitons pas délibérément faire du mal à nos enfants. Travailler sur cette culpabilité est important, car elle nous sépare bien vite de ceux qu’on aime alors qu’on aimerait se rendre disponible pour eux. Si vous ne parvenez pas à faire disparaître cette culpabilité, il peut être utile de prendre quelques consultations avec un psychologue. Il pourra sans doute vous emmener vers un chemin plus apaisé.

Rappelons-nous aussi que nous ne sommes pas dans la tête des autres, même des plus proches. Lorsque nous anticipons quelle pourrait être leur réaction, nous projetons en fait sur nos enfants l’amplitude de nos propres angoisses. Mais si leur comportement vous inquiète, n’hésitez pas une fois de plus à consulter un psychologue pour enfants ou pédopsychiatre. Il ne faut souvent qu’un peu d’aide pour débloquer la situation.

Pour plus d’information, n’hésitez pas à contacter votre médecin.

FR-NON-00640, novembre 2022

Sources :

  1. American Cancer Society. Helping Children When a Family Member has Cancer: Dealing with Diagnosis. Atlanta, GA: American Cancer Society; 2012.
  2. Société Canadienne du cancer, Parler du cancer aux enfants, https://cancer.ca/fr/living-with-cancer/coping-with-changes/talking-about-cancer/talking-to-children-about-cancer Consulté le 10/09/2021