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Depuis 2018, les modalités de dépistage du cancer du col ont changé. Pour quelle raison ?

Pr You : Quand on organise un programme national de dépistage, il faut toujours déterminer des âges charnières. Il y a très peu de cancers du col avant 25 ans et peu après 65 ans, ce qui justifie le choix de ces âges. Quant aux différences de modalités selon les âges elles sont liées au fait que le test HPV n’est pas forcément pertinent chez la femme jeune. On risque de retrouver beaucoup de tests HPV positifs, qui vont affoler inutilement ces femmes puisque dans l’immense majorité des cas, elles vont éliminer le virus spontanément.  C’est pourquoi chez la femme de moins de 30 ans, il est préférable de réaliser des dépistages par frottis, même si le frottis est un examen moins sensible que le test HPV et plus « opérateur-dépendant ». Au-delà, le test HPV est plus pertinent.

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Et pour les femmes plus jeunes, quel est leur risque ? On dit qu’habituellement il faut 10 à 20 ans entre le moment de l’infection au HPV et le développement d’un cancer du col, comment expliquer la survenue de ce cancer chez des femmes extrêmement jeunes (moins de 25 ans voire parfois moins de 20 ans) ?

Pr You : Il y a une grande variabilité inter-individuelle entre les femmes. Dans certains cas en effet, le temps entre l’infection à HPV et le développement du cancer peut être plus court. Chez ces femmes jeunes, on rencontre habituellement des formes très agressives de cancer. Pour cette raison —et même si le dépistage organisé ne débute qu’à l’âge de 25 ans— j’aurais tendance à conseiller de réaliser les premiers frottis plus précocement. Surtout si la femme a commencé sa vie sexuelle très jeune et connu de nombreux partenaires. Le gynécologue, qui connaît bien ses patientes, est la personne la plus à même d’évaluer le risque et de proposer un premier frottis au meilleur moment. 

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Peut-on être réinfecté au HPV dans une seconde partie de sa vie alors qu’on a déjà eu une première infection et une conisation ou même un premier cancer ?

Pr You : Oui c’est possible. Quand le système immunitaire a failli une première fois et laissé passer le HPV, il peut faillir une seconde fois. Curieusement la première infection ne protège pas et l’on peut être contaminé par le même HPV.

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Du coup cela aurait-il du sens de vacciner même au-delà de 26 ans ? 

Pr You : Cela pourrait avoir du sens. Même si la protection du vaccin est plus faible chez l’adulte, elle reste significative. Une étude publiée dans le New England Journal of Medicine a montré que chez des femmes de 30 ans exposées antérieurement au HPV, le vaccin entrainait une protection de l’ordre de 50 %. Ce n’est pas 95 % comme pour la vaccination chez les adolescentes non exposées antérieurement au virus mais c’est déjà intéressant. Aux Etats-Unis, on propose d’ailleurs la vaccination jusqu’à 45 ans. Il y a même des études en cours sur la vaccination « post-thérapeutique » (après qu’on a soigné chirurgicalement des lésions). Ces études montrent un bénéfice en matière de réduction des récidives notamment pour le HPV16 et 18. Certains pays ont d’ores et déjà émis des recommandations dans ce sens[1]. 

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Certaines femmes se découvrent porteuses du virus HPV, elles n’arrivent pas à s’en débarrasser et vivent avec l’inquiétude de développer un cancer. Que peut-on faire pour les aider à éradiquer le virus ? Il n’y a pas de médicament contre le HPV, est-ce que le vaccin aurait un rôle à jouer ?

Pr You : Il y a peu de données permettant de penser que vacciner une femme qui a un HPV tapi dans son organisme pourrait l’aider à combattre l’infection. A ce jour le seul conseil que l’on peut donner c’est d’être extrêmement vigilant, pour soi-même et pour les autres. 

– Pour soi-même en ayant un suivi très rapproché chez le gynécologue.

– Et pour les autres en se souvenant que le HPV est une MST, qu’on peut la transmettre à ses partenaires et qu’il est donc important tant que le HPV est présent, d’avoir des relations sexuelles protégées pour limiter le risque de contamination. 

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Beaucoup de femmes regrettent d’avoir négligé des petits signes et découvert leur cancer à un stade trop tardif. Comment sensibiliser les femmes et leurs médecins au risque du cancer du col ?

Pr You : Toutes les femmes n’ont pas forcément de signes d’appel. Pour celles qui en ont, il s’agit le plus souvent de petits saignements au cours des rapports sexuels. Les médecins sont aujourd’hui de plus en plus formés à ce cancer et si la patiente leur décrit ce symptôme, le médecin y pensera. 

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Quels sont les traitements d’avenir et les voies de recherche ?

Pr You : Ce qui domine aujourd’hui c’est l’immunothérapie. Le système immunitaire est majoritairement impliqué dans les cancers du col depuis la phase initiale (celle de l’infection au HPV) jusqu’aux phases métastatiques où des médicaments (des anticorps monoclonaux) sont utilisés pour activer le système immunitaire. Aujourd’hui ces anticorps monoclonaux sont donnés à des stades très tardifs de la maladie. L’avenir serait de les utiliser plus tôt. De récents travaux suggèrent qu’associée à la radiothérapie, l’immunothérapie augmenterait les chances de guérison.  

L’autre piste extrêmement intéressante ce sont les vaccins thérapeutiques. La recherche est en pleine ébullition. Alors que le vaccin HPV est un vaccin prophylactique qui vise à protéger contre l’infection au HPV, les vaccins thérapeutiques ciblent la tumeur elle-même. Ces vaccins représentent un espoir majeur pour les cancers actuellement incurables. (Voir encadré 1)

Enfin, les anticorps conjugués, sortes de petits missiles chargés de chimiothérapie. Ils ciblent les cellules cancéreuses et quand ils entrent dans la cellule cancéreuse ils dégoupillent leur chimiothérapie. 

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Pour finir, quels sont les messages clefs que vous souhaiteriez transmettre aux femmes en général à propos du cancer du col et aux femmes touchées par dysplasie ou un cancer en particulier.

Pr You : D’abord leur parler de prévention. Le cancer du col est sans doute un des seuls pour lesquels on a une vraie cible, le HPV. Avoir une cible nous donne le moyen de prévenir et on l’espère le moyen d’éradiquer ce cancer. Cela passe par la vaccination des garçons et des filles, le plus précocement possible. Mais pas seulement : le dépistage reste essentiel. La France était en retard mais on voit une volonté politique claire de rattraper ce retard.

Pour les femmes qui sont touchées par des dysplasies ou un cancer, je voudrais leur dire de garder espoir. Ce cancer peut être ravageur, d’autant qu’il touche des femmes souvent jeunes. Mais les progrès en médecine sont fantastiques. Et avec le développement de l’immunothérapie et des vaccins thérapeutiques, on devrait pouvoir vaincre ce cancer.  Si l’on en croit les études préliminaires que nous avons vu sortir ces dernières années, je suis certain que nous allons faire des pas de géants en matière de traitements du cancer du col.

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Pour aller plus loin

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